Bruit de fond ou valeur ajoutée ? Gérer le bruit lors des traitements informatiques des corpus linguistiques
AAC/CFP Corpus 26 – 2025
https://journals.openedition.org/corpus/
Sous la direction de Elisa Gugliotta, Luca Pallanti, Olivier Kraif, Iris Fabry et Martina Barletta
call for papers deadline: 6 Novembre 2023
English version below
L’influence croissante des méthodologies liées au TAL sur la linguistique de corpus oblige les chercheurs à réinterroger les pratiques de gestion du bruit et son impact dans les résultats de recherche (Fuchs & Habert, 2004 ; Léon, 2018 ; Zalmout et al., 2018). Qu’il s’agisse de corpus en diachronie longue (ex. français médiéval), de corpus dialectaux aux ressources limitées (ex. textes oraux ou écrits en arabe dialectal, cf. arabizi), ou encore de corpus de textes éloignés de la norme (ex. corpus d’apprenants), l’analyse du bruit est une étape nécessaire pour tirer des conclusions linguistiques des données ainsi évaluées (Molinelli & Putzu, 2015 ; Scaglione, 2018 ; Litosseliti, 2018). Ce numéro thématique de la revue Corpus, qui fait suite à une journée d’étude sur le même thème organisée en avril 2023 (https://je-bruit-corpus.sciencesconf.org/), sera l’occasion de réfléchir sur les méthodes de gestion du bruit dans les domaines du TAL et de la linguistique de corpus outillée, et à son impact sur la qualité des données linguistiques (Kraif et Ponton, 2007 ; Goutte et al., 2012 ; Zeroual, 2018).
Les questions sous-jacentes à toute étude linguistique concernent la définition de l’objet de recherche, la nature des données elles-mêmes, et la manière de préserver autant que possible leurs caractéristiques dans les différents traitements (lemmatisation, normalisation, étiquetage, etc.) (Sarrica et al., 2016). Ainsi, le choix des méthodes d'identification et de contrôle du bruit, de la phase de collecte à celle d'archivage, de la préparation des données à l’annotation, joue un rôle fondamental (Egbert & Baker, 2019). La définition même du bruit est multiple, et ne va pas de soi : dans le seul champ du TAL, ce terme, souvent peu interrogé, désigne des phénomènes variables et très hétérogènes, allant des péritextes du Web – hyperliens, menus et codes informatiques – au code switching, en passant par les erreurs d'orthographe ou de grammaire qui émaillent les productions (Al Sharou et al., 2021).
Ce numéro thématique propose de mener une réflexion sur la définition du bruit, dans une perspective linguistique, et sur les pratiques des chercheurs visant à réduire la portée des biais qui en découlent, que ce soit durant la collecte, l’enregistrement ou l’annotation des données. Dans le concret de la recherche, la question du bruit se pose à chaque étape de la démarche empirique de construction et d’analyse des données :
1. Le bruit pendant la collecte et l’enregistrement des données
Si l’on accepte le postulat selon lequel « la donnée linguistique est un résultat » (Benveniste, 1966), comment décoder le bruit causé par le recueil des données et leur enregistrement ? En effet, en fonction des objets de recherche, il existe des facteurs potentiels d’altération des données, comme par exemple les préconceptions du chercheur, ou les biais introduits par un système OCR donné (Jentsch & Porada, 2020). L’enjeu consiste alors à prédire ou à déterminer les biais potentiels induits par ces facteurs lors de la sélection et la mise en forme des données pour mieux contrôler les phases de recherche successives.
2. La préparation et le prétraitement des données.
Les méthodes choisies pour affiner les données brutes et les rendre disponibles pour des manipulations avancées peuvent représenter une importante source de bruit (ou, au contraire, de silence si on applique un filtre pour éliminer le bruit) : c’est notamment le cas du processus de normalisation des données (Al Sharou et al., 2021). Qu’il s’agisse de transcrire des données ou de corriger des erreurs, le chercheur fait des choix qui impactent nécessairement la nature des données, soit en les réduisant, soit en les enrichissant. Il s’agit donc d’anticiper les conséquences des transformations produites par les méthodes de traitement des données (Tanguy, 2012).
3. Le processus d’annotation et les métadonnées
À la base, l’annotation des corpus est une étape visant l’enrichissement des données : en fonction du modèle d’analyse mis au point, le chercheur tente de catégoriser des unités à travers un processus d’étiquetage (Péry-Woodley et al., 2011). Cependant, si d’un côté ce processus peut générer du bruit, de l’autre, il peut être une cause de silence fort préjudiciable aux résultats des recherches et à leur interprétation (des étiquettes absentes ou erronées pouvant générer des résultats lacunaires lors de l’analyse ou du requêtage des données). La notion de métadonnée peut également être mise en cause : catégoriser une donnée signifie-t-il la transformer en quelque chose d’autre ? Par ailleurs, l’absence d’accord ou un faible accord dans les annotations produites par l’humain manifeste-t-il des variations interindividuelles assimilables à du bruit, ou au caractère trop vague des catégorisations en jeu ?
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A chaque étape se posent des questions méthodologiques centrales : à partir de quel seuil peut-on considérer le bruit comme acceptable ? Comment différencier bruit et biais méthodologique ? Comment estimer le bruit sans vérité de terrain ? Quels outils statistiques spécifiques à l’étude des corpus permettent de délimiter des intervalles de confiance ? Comment atteindre l’équilibre nécessaire pour que le bruit causé par les traitements des données ne compromette pas les résultats des recherches ?
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Les propositions d’article pourront aborder ces questions d’un point de vue général, sous un angle théorique et méthodologique, ou s’appuyer sur une ou plusieurs études de cas portant sur des observations particulières, en prenant soin de mettre en lumière les méthodes de gestion du bruit tout au long de l’étude.
Références
Al Sharou, K., Li, Z., & Specia, L. (2021). Towards a Better Understanding of Noise in Natural Language
Processing. Proceedings of the International Conference on Recent Advances in Natural Language
Processing (RANLP 2021), 5362. https://aclanthology.org/2021.ranlp-1.7
Benveniste, É. (1966). Problèmes de linguistique générale. Gallimard.
Egbert, J., & Baker, P. (Eds.). (2019). Using corpus methods to triangulate linguistic analysis. Routledge.
Fuchs, C., & Habert, B. (2004). Le traitement automatique des langues : Des modèles aux ressources. Le Français Moderne - Revue de linguistique Française, CILF (conseil international de la langue française), LXXII: 1, en ligne.
Retro-planning
• Juillet 2023 : publication du l’Appel • Novembre 2023 : pré-sélection sur résumé
• Mars 2024 : remise des articles.
Juin 2024 : réponse aux auteurs
• Juin-octobre 2024 : navette avec les auteurs pour remise de l’article en forme définitive.
• Novembre-décembre 2024 : édition.
• Janvier 2025 : publication.
Soumission des résumés
• Votre résumé comptera 1.500 mots au maximum, références bibliographiques inclues.
• Merci de soumettre vos résumés pour le 6 novembre 2023 aux adresses Questo indirizzo email è protetto dagli spambots. È necessario abilitare JavaScript per vederlo. et Questo indirizzo email è protetto dagli spambots. È necessario abilitare JavaScript per vederlo.
Background noise or added value? Managing noise during computer processing of linguistic corpora
Elisa Gugliotta, Luca Pallanti, Olivier Kraif, Iris Fabry et Martina Barletta (eds.)
The increasing influence of NLP-related methodologies on corpus linguistics has compelled researchers to reassess their practices for managing noise and its impact on research results (Fuchs & Habert, 2004; Léon, 2018; Zalmout et al., 2018). Whether working with long-diachronic corpora (e.g., medieval French), dialectal corpora with limited resources (e.g., oral or written texts in dialectal Arabic, cf. Arabizi), or corpora of texts deviating from the norm (e.g., learner corpora), conducting noise analysis becomes an essential step in drawing linguistic conclusions from the available data (Molinelli & Putzu, 2015; Scaglione, 2018; Litosseliti, 2018). This special issue of Corpus builds upon a workshop held in April 2023 (https://je-bruit-corpus.sciencesconf.org/) and offers an opportunity to examine noise management methods in the fields of NLP and corpus linguistics, as well as their impact on the quality of linguistic data (Kraif & Ponton, 2007; Goutte et al., 2012; Zeroual, 2018).
The fundamental inquiries in any linguistic study revolve around defining the research object, understanding the nature of the data, and determining ways to preserve its inherent characteristics throughout the various processing steps (such as lemmatisation, normalisation, labelling, etc.) (Sarrica et al., 2016). Hence, selecting appropriate methods for identifying and controlling noise becomes crucial throughout the entire process, from data collection to the archiving phase, and from data preparation to annotation (Egbert & Baker, 2019). The definition of noise itself is diverse and far from self-evident. In the field of NLP alone, this term encompasses a wide range of highly heterogeneous phenomena, including web peritexts – such as hyperlinks, menus and computer codes – as well as code switching and instances of spelling or grammatical errors that punctuate productions (Al Sharou et al., 2021).
This special issue aims to delve into the definition of noise, from a linguistic perspective, and the practices employed by researchers to mitigate the biases that can arise from it. These practices are implemented during collection, recording, and annotation of data. The question of noise inevitably emerges at each stage of the empirical process involved in data construction and analysis:
1. Noise during data collection and recording
If one accepts the postulate that "linguistic data is a result" (Benveniste, 1966), decoding the noise stemming from data collection and recording becomes crucial. Depending on the research object, various factors may contribute to data alteration, including the researcher's preconceptions or the biases introduced by an OCR system (Jentsch & Porada, 2020). The key challenge lies in predicting or identifying the potential biases induced by these factors during the selection and formatting of data.
This enables better control over subsequent research stages and ensures greater accuracy in the analysis process.
2. Data preparation and pre-processing
The methods employed to refine raw data and prepare it for advanced manipulation can give rise to a significant source of noise (or, conversely, of silence, if noise elimination filters are applied). This is particularly evident during the data normalization process (Al Sharou et al., 2021). When transcribing data or correcting errors, researchers must make choices that inevitably influence the nature of the data, either by reducing or enriching its content. As a result, it becomes essential to anticipate the consequences of the transformations introduced by data processing methods (Tanguy, 2012).
3. The annotation process and metadata
Initially, corpus annotation aims to enrich the data by categorizing units through a labelling process, depending on the developed analysis model (Péry-Woodley et al., 2011). However, while this process has the potential to introduce noise, it can result in detrimental silence (when missing or erroneous labels lead to incomplete results during data analysis or querying). The concept of metadata also raises questions: does categorizing data transform it into something different? Furthermore, does the absence of agreement or low agreement in annotations produced by humans reflect inter-individual variations akin to noise, or does it stem from the inherent vagueness of the categorizations themselves?
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At each and every step of the process, key methodological questions arise: what threshold can be considered acceptable for noise? How can we differentiate between noise and methodological bias? Is it possible to estimate noise without a ground truth? Which statistical tools are specific to corpus studies and enable the definition of confidence intervals? How can we strike a balance to prevent the noise resulting from compromising research outcomes?
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Proposals for articles may address these topics from a general point of view, offering a theoretical and methodological perspective. Alternatively, they can be based on one or more case studies that focus on specific observations, while highlighting the noise management methods employed throughout the study.
References
Al Sharou, K., Li, Z., & Specia, L. (2021). Towards a Better Understanding of Noise in Natural Language
Processing. Proceedings of the International Conference on Recent Advances in Natural Language Processing (RANLP 2021), 5362. https://aclanthology.org/2021.ranlp-1.7
Benveniste, É. (1966). Problèmes de linguistique générale. Gallimard.
Egbert, J., & Baker, P. (Eds.). (2019). Using corpus methods to triangulate linguistic analysis. Routledge.
Fuchs, C., & Habert, B. (2004). Le traitement automatique des langues : Des modèles aux ressources. Le Français Moderne - Revue de linguistique Française, CILF (conseil international de la langue française), LXXII: 1, online.
Goutte, C., Carpuat, M., & Foster, G. (2012). The impact of sentence alignment errors on phrase-based machine translation performance. In Proceedings of the 10th Conference of the Association for Machine Translation in the Americas: Research Papers.
Jentsch, P., & Porada, S. (2020). From Text to Data : Digitization, Text Analysis and Corpus Linguistics.
In S. Schwandt (Éd.), Digital Humanities Research (1re éd., Vol. 1, p. 89128). transcript Verlag / Bielefeld University Press. https://doi.org/10.14361/9783839454190-004
Kraif, O., & Ponton, C. (2007). Du bruit, du silence et des ambiguïtés : Que faire du TAL pour l’apprentissage des langues ? TALN 2007, 143152. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01073706
Léon, J. (2018). Tal et linguistique : Application, expérimentation, instrumentalisation. ELA. Etudes de linguistique appliquee, 2(190), 195203.
Litosseliti, L. (Ed.). (2018). Research methods in linguistics. Bloomsbury Publishing.
Molinelli, P., & Putzu, I. (2015). Modelli epistemologici, metodologie della ricerca e qualità del dato. Dalla linguistica storica alla sociolinguistica storica. Franco Angeli.
Péry-Woodley, M.-P., Afantenos, S. D., Ho-Dac, L.-M., & Asher, N. (2011). La ressource ANNODIS, un corpus enrichi d’annotations discursives. TAL, 52(3), 71101.
Sarrica, M., Mingo, I., Mazzara, B., & Leone, G. (2016). The effects of lemmatization on textual analysis conducted with IRaMuTeQ: results in comparison. JADT2016: 13ème Journées Internacionales d’Analyse Statistique de Données Textuelles.
Scaglione, F. (2018). “Lavorare”; il dato linguistico: Prospettive e limiti. Alcune considerazioni dall’esperienza dell’Atlante Linguistico della Sicilia (ALS). In G. Sampino (Éd.), Atti del convegno internazionale dei dottorandi (p. 101122).
Tanguy, L. (2012). Complexification des données et des techniques en linguistique : contribution du TAL aux solutions et aux problèmes. HDR dissertation, Université de Toulouse 2 - le Mirail.
Zalmout, N., Erdmann, A., & Habash, N. (2018). Noise-robust morphological disambiguation for dialectal Arabic. In Proceedings of the 2018 Conference of the North American Chapter of the Association for Computational Linguistics: Human Language Technologies, Volume 1 (Long Papers) (pp. 953-964).
Zeroual, I. (2018). Building Arabic Corpora: Concepts, Methodologies, Tools, and Experiments (Doctoral dissertation, University of Maryland, USA).
Retro-planning
• July 2023: call for publications.
• November 2023: pre-selection based on article summaries.
• March 2024: article submission deadline.
• June 2024: response to the authors.
• June-October 2024: review process with authors to submit the final version of the article.
• November-December 2024: editing process.
• January 2025: publication.
Please note that this retro-planning outlines a general timeline and may vary depending on the specific publication requirements.
Abstract submission
• Your abstract should be no longer than 1,500 words, including bibliographical references.
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